Le pardon religieux dédié à Saint Loup se tenait dans les prairies attenantes au château de Runevarec, en Pabu, appelé Saint-Loup car sa chapelle est dédiée à Loup de Troyes. Selon le spécialiste de la danse bretonne, Jean-Michel Guilcher, qui se base sur des témoignages oraux : « L’origine de la fête elle-même remonterait au plus lointain passé. À Guingamp, les fêtes de la Saint-Loup auraient été rétablies dans le premier quart du XIXe siècle, après une interruption durant la période révolutionnaire. L’initiative de la reprise serait venue d’un groupe de bourgeois de la ville. »
En 1848, d’après un article du journal local, le Publicateur des Côtes-du-Nord, on y célèbre la fête le premier week-end de septembre par un pardon suivi d’un bal ; « on s’en est revenu en ville en dansant sans discontiner la dérobée et le soir, les danses ont encore repris sur la place du Centre au milieu des illuminations ». Au XIXe siècle, la danse « dérobée » se pratique en cortège depuis Pabu jusqu’à Guingamp suivant plusieurs itinéraires et les danses démarrent au centre ville vers huit heures du soir d’après le règlement de 1950. En 1850, le prix d’entrée de la place du centre était modique, trente centimes et l’esprit reste bon enfant. Au fur et à mesure, la fête prend de l’ampleur et attire un public venu de plus en plus loin.
D’autres animations se rajoutent au programme. En 1863 c’est l’inauguration de la ligne de train Paris-Guingamp. Dans les années 1870, la soirée du samedi est rajoutée en organisant une retraite aux flambeaux, en 1893 il y a une fête aéronautique et en 1899, des concours de tir aux pigeons et de tir à la carabine sont organisés le lundi matin. Très tôt aussi, la Saint-Loup s’associe à d’autres manifestations bretonnes. En 1900, les réjouissances du pardon s’étalent ainsi sur plus d’une semaine, lorsque l’Union régionaliste bretonne organise un congrès à Guingamp. L’année suivante, toujours en parallèle des fêtes, se tient la première réunion du Gorsedd de Bretagne, inspiré du collège bardique gallois. En 1909, les premiers tournois de gouren, la lutte bretonne, sont organisés le dimanche matin. Cette pratique reste par la suite ancrée dans la fête.
Dans les années 1920, la place importante laissée à la culture bretonne à Guingamp se confirme et la fête à Pabu garde son côté champêtre. Les gens continuent de descendre dans la soirée la rue de Montbareil en dansant la dérobée et en suivant les codes : les enfants en premier, chantant des comptines, puis les adolescents et enfin les adultes, tout le monde en cadence. Jean-Michel Guilcher souligne que la Saint-Loup a conservé plus longtemps qu’ailleurs « le caractère de cortège dansant ouvert à tous, bourgeois, commerçants, employés et artisans. Les participants dansaient tout l’après-midi dans le champ de la Saint-Loup, distant de la ville de deux kilomètres environ. Le répertoire (scottishes, mazurkas, polkas, pas de quatre) était celui des salons, les costumes ceux de la mode parisienne ».
Les deux guerres mondiales stoppent momentanément la fête. En 1925, le lundi de la Saint-Loup coïncide avec l’organisation de la fête du Bleun Brug à Guingamp. Elle intègre un défilé historique, avec une duchesse Anne guingampaise, une noce bretonne et de nombreux groupes en costume. Le succès reste mitigé : de tradition radicale et volontiers anticléricale, Guingamp se méfie de ce Bleun Brug jugé trop lié à l’Eglise. À partir de 1935, la Saint-Loup renforce la place des musiques et danses traditionnelles. Des sonneurs de bombarde et biniou sont conviés chaque année et pour la première fois, en 1937, un cercle celtique, celui de Bégard, intervient en renfort pour danser la dérobée, dont les pas semblent de plus en plus ignorés par la population locale.
Après 1945, la Saint-Loup peine à retrouver son audience populaire, la pluie rend impraticable le champ de Runvarec et la fête ressemble plus à une sorte de kermesse. Dès 1953, la Saint-Loup se cantonne au centre de Guingamp mais les organisateurs s’interrogent sur la manière de redorer l’attrait de la vielle fête.
Depuis 1957, le festival sert de cadre au championnat national de danse bretonne de la confédération Kendalc’h. Le comité Kendalc’h et le comité des fêtes ont l’idée de créer une fête qui ressemble à la version contemporaine du festival et qui se déroule mi-août sur deux jours : défilé le samedi soir et danse le dimanche. La première édition de la « nouvelle formule » est un succès ; en présentant la richesse du patrimoine traditionnel, près de trente mille personnes assistent aux prestations des trente cercles et bagadoù.
Le 27 juin 2020, les deux fédérations de danses bretonnes Kendalc’h et War’l Leur fusionnent pour devenir Kenleur. Cette confédération des cercles celtiques regroupe entre 200 et 210 associations.
Dans les années 1970, la musique traditionnelle est en plein renouveau. et le grand public découvre la musique bretonne sous un autre jour. Les costumes traditionnels sont revisités, les jupes des danseuses se raccourcissent et les cercles bretons innovent dans leurs chorégraphies.
En 1985, le comité d’organisation élit un nouveau président, Jean-Pierre Ellien, fondateur du bagad Gwengamp, qui va accompagner une évolution notoire de la Saint-Loup. En effet, à partir des années 1980, le festival se déroule sur neuf jours.
Chaque année, ce rendez-vous de la culture bretonne prend toujours un peu plus d’ampleur. Aujourd’hui ce sont près de 2 500 sonneurs, artistes et danseurs venus de tout le monde celtique (gallois, écossais, irlandais, asturiens, galiciens…) qui fréquentent la ville du Trégor. De nombreuses animations, expositions, fest-noz, concours de danse traditionnelle jalonnent la semaine et des concerts ont lieu tous les soirs.
En 2011, un livre écrit par Loïc Le Guillouzer retrace l’histoire du festival depuis les années 1930, accompagné des illustrations de Jeanic Le Voyer. Jean-Pierre Ellien, président du festival depuis 1984, est décédé le 18 octobre 2013. Hervé Rouault prend sa succession à la présidence du festival jusqu’en 2020, avant d’en devenir président d’honneur jusqu’en 2022, année où il nous quittera brutalement le 1er novembre. Depuis 2021, 2 coprésidents, Malo Dornemin et Benoît Queffeulou sont à la tête du festival.
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